Qu'est-ce que le déficit en biosynthèse de la créatine ?
La créatine est une molécule qui permet aux cellules cérébrales et musculaires de se constituer une réserve d'énergie. Le déficit en créatine, ou plus précisément le déficit de la biosynthèse de la créatine, regroupe les 3 maladies qui font que la créatine n'est pas présente en quantité suffisante au niveau cérébral et musculaire. Les symptômes communs à ces maladies sont des difficultés intellectuelles, un retard de langage, une épilepsie, souvent associés à d'autres troubles neurologiques non spécifiques comme une dyspraxie ou des troubles du langage et à une atteinte musculaire de sévérité variable. Un traitement spécifique du déficit par supplémentation en créatine n'est possible que dans 2 de ces 3 maladies, permettant de faire régresser en partie les symptômes.
Pourquoi ?
La créatine est une molécule permettant de stocker de l'énergie au niveau des cellules cérébrales et musculaires. Elle est naturellement produite par le corps humain dans le foie. La maladie fut décrite la première fois en 2001 lorsqu'une quantité anormalement basse de créatine fut retrouvée dans le cerveau de certains patients.
Le déficit en créatine, ou plus précisément le déficit de la biosynthèse de la créatine, regroupe 3 maladies qui provoquent une carence en créatine, et donc en énergie, au niveau cérébral et musculaire. Deux enzymes sont en effet nécessaires pour fabriquer la créatine dans le foie : l'arginine glycine amidinotransférase (AGAT) et la guanidinoacétate méthyltransférase (GAMT) ; le déficit en l'une de ces enzymes (absente ou fonctionnellement anormale) aboutit à un déficit en créatine. Enfin, la créatine passe dans le sang et rentre dans le cerveau et les muscles en utilisant un transporteur : le transporteur de la créatine (CRTR), qui lui-même peut être défaillant. Les mécanismes plus fins qui expliquent précisément les symptômes de la maladie ne sont pas bien connus, mais résulteraient à la fois de la carence en énergie dans le cerveau et le muscle mais également de l'accumulation anormale, dans ces mêmes organes, de guanidinoacétate, composé toxique produit en grande quantité lorsque la synthèse de la créatine est déficiente.
Quels symptômes et quelles conséquences ?
Ces trois maladies ont un commun des difficultés intellectuelles , une épilepsie et un retard de langage ; leur sévérité peut varier grandement d'un enfant à l'autre.
Ainsi, les difficultés intellectuelles peuvent être modérées chez certains et d'autres fois très sévères ; elles affectent notamment la mémoire et les capacités de raisonnement.
Si l'enfant a une épilepsie, les conséquences en sont variables selon le ou les types d'épilepsie et selon l'efficacité du traitement. (voir fiche Épilepsie).
Les conséquences du déficit en créatine au niveau des muscles sont également variables. Certains enfants n'ont aucun problème moteur. Pour d'autres, l'atteinte motrice peut être responsable d'une fatigabilité, d'une lenteur, voire de troubles de la marche (équilibre précaire, marche difficile) pouvant aller jusqu'à nécessiter l'utilisation d'un fauteuil roulant.
D'autres symptômes sont plus spécifiques de tel ou tel déficit :
1. Dans le déficit en transporteur de la créatinine : le retard de langage semble lié à un problème de coordination motrice de la parole (= dyspraxie motrice, voir fiche Dyspraxie), à des troubles de la phonétique et à des difficultés pour dénommer les images alors que le vocabulaire semble bon. Les enfants sont sociables, bien qu'ils puissent être irritables et/ou présenter des crises d'agitation Les filles ont habituellement des symptômes moins prononcés que les garçons ; certaines peuvent avoir uniquement des problèmes d'apprentissage et des troubles du comportement. Une faiblesse musculaire et une constipation sont les signes de l'atteinte musculaire dans cette maladie.
2. Dans le déficit en AGAT : outre des difficultés intellectuelles, une épilepsie et un retard de langage, les enfants peuvent avoir un comportement proche de celui d'un enfant autiste.
3. Dans le déficit en GAMT : il peut également y avoir des troubles du comportement pouvant ressembler à un autisme. L'enfant peut être agressif envers lui-même en s'infligeant des blessures. La moitié des patients présentent aussi des troubles neurologiques comme une faiblesse musculaire et/ou des mouvements anormaux (tremblements, problème de coordination des mouvements y compris pour la parole, dystonie).
Quelques chiffres
Ce groupe de maladie fut décrit la première fois en 2001. La prévalence et l'incidence de ces maladies ne sont de ce fait pas bien connues.
Selon certaines études, le déficit en transporteur de la créatine pourrait toucher 2 % des garçons et ainsi être une cause majeure de retard psychomoteur, alors que pour les déficits en GAMT et en AGAT seuls quelques cas ont été rapportés dans le monde.
Traitement
Les enfants ayant un déficit en GAMT ou en AGAT peuvent bénéficier d'un traitement par créatine, à prendre par voie orale plusieurs fois par jour, permettant de restaurer le stock de créatine dans le muscle et le cerveau. Dans certains cas, ce traitement a permis la régression ou la non-apparition des symptômes de la maladie.
Chez les patients ayant un déficit en transporteur de la créatine, le traitement par créatine n'est pas efficace, puisque celle-ci ne peut pas entrer dans le cerveau et dans le muscle faute de la protéine transporteur.
Dans le déficit en GAMT, certaines équipes médicales peuvent proposer des traitements complémentaires tels qu'un régime limité en protéines ou un traitement par ornithine, limitant tous les deux la formation du composé toxique guanidinoacetate.
Un traitement antiépileptique est souvent indispensable, ainsi que des médicaments antidystoniques, destinés à améliorer le contrôle des mouvements.
Pour quelques enfants, ces prises médicamenteuses résumeront le traitement. Cependant, le plus souvent, les enfants nécessitent également des rééducations qui amélioreront considérablement leur qualité de vie et leur degré d'indépendance : kinésithérapie, psychomotricité et orthophonie en particulier. Ces prises en charge pourront par exemple être assurés au sein d'un CAMSP ou d'un Sessad.
Conséquences sur la vie scolaire
Les enfants porteurs d'un déficit de la synthèse de la créatine ont une capacité d'apprendre et de progresser, pour certains au même rythme que les autres enfants. Il est donc important pour ces enfants d'être accueillis et scolarisés avec tous les dispositifs nécessaires à leur réussite.
L'intensité et la nature des difficultés pouvant être très différentes d'un enfant à un autre, une évaluation multidisciplinaire (neurologue pédiatre, kinésithérapeute, psychomotricien, psychologue, éducatrice spécialisée, etc.) préalable permettra la mise en place d'une aide « sur-mesure ».
Pour les enfants scolarisés en milieu ordinaire, l'élaboration d'un Projet personnalisé de scolarisation (PPS) est souvent nécessaire pour préciser les aménagements à mettre en place (voir §8). Pour les enfants qui présentent des difficultés intellectuelles plus importantes, des dispositifs d'inclusion scolaire du type ULIS pourront être envisagés. Enfin, les enfants ayant les difficultés motrices et/ou intellectuelles les plus sévères pourront nécessiter une orientation spécialisée vers un établissement de type IME, EMP ou IMPro.
Lorsque des prises médicamenteuses sont nécessaires pendant le temps scolaires, elles doivent être formalisées dans le cadre d'un Projet d'accueil individualisé (PAI).
Quand faire attention ?
En cas de crise convulsive, il convient, si l'enfant chute, de freiner sa chute puis d'attendre la fin des convulsions en évitant que l'enfant ne se blesse avec les objets alentours. À la fin de la crise, il sera possible de l'allonger sur le côté en Position Latérale de Sécurité (PLS), couché sur le côté, tête tournée. Il est rare qu'il y ait des médicaments à administrer (sauf cas particulier prévu dans le PAI ou le PPS) car la crise cesse généralement d'elle-même au bout de quelques secondes ou minutes. Devant toute crise qui se prolonge au-delà de 15 minutes, il faut appeler les secours (Samu ou pompiers) pour une hospitalisation en urgence afin de stopper cette crise avec des médicaments intraveineux.
L'enfant peut présenter une période de somnolence ou de confusion après la crise (phase post-critique) qui peut parfois durer plusieurs minutes. À ce moment-là, la crise d'épilepsie est finie et il faut aider le jeune à « retrouver ses esprits », le rassurer en lui expliquant ce qui vient de se passer. Cette phase post-critique n'a aucun caractère de gravité.
Lors des récréations ou de déplacements à l'extérieur, l'équilibre précaire expose certains élèves à des risques de chutes qui peuvent être préjudiciables : les marches sur de longues distances, sur des terrains accidentés ou peu accessibles peuvent se révéler être des difficultés supplémentaires.
Les troubles du comportement de certains enfants porteurs d'un déficit de la synthèse de la créatine pourraient les mettre en danger que ce soit en rapport avec une réponse inadaptée à une situation dangereuse, ou en rapport avec une auto-agressivité.
L'éducation physique et sportive est recommandée en prenant compte des difficultés de l'enfant. Cependant il conviendra d'interdire tout activité physique comportant un danger en cas de crise convulsive (accrobranche, plongée sous-marine...). Lorsque l'épilepsie est équilibrée et sur avis médical, l'élève peut aller à la piscine avec la classe sous réserve d'avoir averti le responsable.
Certaines activités physiques peuvent être également inappropriées (par exemple la marche prolongée chez un enfant ayant un déficit musculaire, ou la marche sur terrain accidenté en cas de trouble de l'équilibre).
Comment améliorer la vie scolaire des enfants malades ?
Un projet personnalisé de scolarisé (PPS) ou un PAI est le plus souvent indispensable afin d'adapter la scolarisation aux capacités et difficultés spécifiques de l'enfant.
1. Les aménagements matériels
Si l'enfant a une atteinte musculaire importante, il est mieux, si possible, de prévoir une classe en rez-de-chaussée ou facilement accessible. Certains enfants peuvent nécessiter un double jeu de livre ou l'usage d'un ordinateur. Prévoir un double jeux de livres permet de limiter la fatigabilité de l'enfant.
2. Les aides humaines : un Accompagnant d'élève en situation de handicap (AESH) peut souvent être utile et demandée en cas de troubles du comportement et/ou de troubles des apprentissages et/ou de troubles moteurs ; elle permet d'accompagner de façon individualisée l'enfant (par exemple pour une aide aux repas ou à l'habillage, ou pour lui proposer des exercices adaptés, en lien étroit avec l'enseignant).
3. L'aménagement du temps scolaire tiendra compte :
- de la lenteur et de la fatigabilité éventuelles de l'enfant : temps supplémentaire pour les examens ou réduction du nombre d'exercices demandés pour un même temps imparti...;
- du besoin de stimulation intellectuelle ;
- des déficits partiels de l'élève (mémoire, langage, praxies) et de ses compétences ;
- des diverses rééducations nécessaires (kinésithérapie, orthophoniste, etc.), examens et consultations médicales.
L'avenir
Cette maladie ayant été décrite récemment, peu de choses sont connues sur le devenir à l'âge adulte ; par ailleurs le traitement par créatine semble être d'autant plus efficace qu'il est débuté précocement.
Il semble que les situations à l'âge adulte sont extrêmement variées en fonction du degré de handicap. Certains élèves mènent une scolarité quasi-normale et les difficultés sont plus musculaires. La plupart des personnes bénéficient d'un emploi protégé alors que d'autres, enfin, n'ont pas les capacités physiques ou intellectuelles pour assurer un travail et prolongent leur scolarité dans un institut spécialisé.
Pour avoir des pistes pédagogiques plus détaillées, voir la rubrique jaune.
Pour travailler en partenariat, voir la rubrique rouge.
Pour connaître le point de vue des personnes concernées, voir la rubrique verte : témoignages ou associations.
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Dystonie
Grec : dus = difficulté ; tonos = ressort.
Contractions prolongées, involontaires des muscles d'une ou de plusieurs parties du corps, entraînant souvent une torsion ou une distorsion de cette partie du corps.