Qu'est-que c'est ?
Les douleurs abdominales (ou maux de ventre) sont un des symptômes les plus fréquents de l'enfant. Elles sont souvent angoissantes mais finalement rarement graves. Les maladies pouvant s'exprimer par des maux de ventre sont extrêmement variées et nombreuses, et n'ont pas toujours une origine abdominale.
Pourquoi ?
Établir une liste de toutes les causes de douleur abdominale est impossible tant celle-ci est longue. En effet, surtout chez le jeune enfant, le ventre est le point de traduction de nombreux symptômes. Il est par ailleurs très difficile pour un enfant de localiser précisément le lieu de sa douleur, qu'il rapporte facilement au ventre. Des maladies pulmonaires, urinaires, articulaires, herniaires, infectieuses, psychologiques... peuvent ainsi donner des douleurs abdominales. Les symptômes associés peuvent orienter le diagnostic.
On distingue généralement les douleurs aiguës des douleurs chroniques, appelées aussi récurrentes ou récidivantes : celles-ci sont définies par la présence d'au moins 3 crises douloureuses, d'intensité suffisante pour perturber l'activité habituelle de l'enfant, depuis au moins 3 mois. Schématiquement, les douleurs abdominales aiguës sont généralement en rapport avec l'atteinte d'un organe, alors que les douleurs récurrentes chez l'enfant d'âge scolaire sont dans la majorité des cas fonctionnelles, c'est à dire sans cause précise identifiée.
Depuis sa première description par le Dr Apley en 1958, le problème des douleurs abdominales récurrentes de l'enfant d'âge scolaire reste mal compris en raison de la multitude de facteurs impliqués. Les symptômes sont souvent vagues et les examens ne révèlent généralement pas de maladie sous jacente. Une hypothèse est qu'il existe une anomalie du système nerveux de l'intestin appelée « hyperalgésie viscérale »: c'est un abaissement du seuil de douleur en réponse à des modifications intestinales liées à une inflammation imputable, par exemple, à une infection ou une allergie. L'environnement psychologique et familial semble également jouer un rôle important. Le « modèle biopsychosocial » postule que ces douleurs récidivantes résultent de la conjonction de facteurs biologiques, du tempérament de l'enfant et des environnements familiaux et scolaires.
Quels symptômes et quelles conséquences ?
A. Douleur aiguë
La douleur aiguë abdominale de l'enfant a le plus souvent une origine organique, c'est à dire qu'elle résulte d'une lésion d'un organe identifiable. Le siège de la douleur est souvent difficile à préciser pour l'enfant qui désigne souvent l'ombilic et est peu informateur. Les symptômes associés à la douleur abdominale sont importants et peuvent orienter vers une maladie éventuellement urgente à prendre en charge : fièvre ou frissons, nausées ou vomissements, diarrhée ou constipation, brûlures urinaires, boiterie, mal de gorge, teint jaune (ictère), traumatisme récent. Le signe associé le plus préoccupant est l'altération de l'état général : l'enfant est abattu, il ne joue plus, il est pâle. L'intensité de la douleur va également orienter vers une cause urgente : pleurs, agitation, jambes repliées, visage décomposé par la douleur, pâleur, refus de manger.
De nombreuses causes sont possibles, majoritairement sans gravité. Les principales causes des douleurs abdominales aiguës de l'enfant sont : les gastroentérites, les intoxications alimentaires, la constipation, l'infection urinaire, les infections ORL (angine, sinusite), l'adénite mésentérique (présence de ganglions enflammés dans le ventre), les pneumopathies (pneumonies), l'appendicite, les hernies, le diabète, les causes gynécologiques (avec en premier lieu, les douleurs de règles), et les hépatites.
La constipation, très fréquente chez l'enfant, est souvent responsable de douleurs chroniques mais peut également entraîner des douleurs aiguës très violentes.
L'appendicite est rare avant 5 ans et se présente le plus souvent comme une douleur violente en bas à droite, associée à des nausées ou vomissements et un fébricule (fièvre peu élevée, autour de 38 à 38,5°).
B. Douleurs abdominales chroniques ou récidivantes ou récurrentes
Elles sont définies par la présence d'au moins 3 crises douloureuses, d'intensité suffisante pour perturber l'activité habituelle de l'enfant, depuis au moins 3 mois.
Ces douleurs récidivantes sont dans la très grande majorité des cas fonctionnelles, c'est à dire que tous les examens restent négatifs et qu'aucune cause précise n'est identifiée. Il n'y a aucune atteinte anatomique, ni infectieuse, ni métabolique, ni inflammatoire. L'enfant continue à grandir et grossir normalement. Les douleurs sont souvent localisées autour de l'ombilic, ne réveillent pas la nuit, ne sont pas accompagnées de fièvre, ni d'altération de l'état général.
Le syndrome de l'intestin irritable ou colopathie fonctionnelle, fréquent chez l'enfant, en fait partie. Ce sont des spasmes abdominaux, soulagés par la défécation, associés à une alternance de diarrhée et de constipation.
Les douleurs abdominales récurrentes, sans cause identifiée, peuvent aussi être une expression de la souffrance psychique de l'enfant. Des douleurs abdominales matinales, paroxystiques, avant le départ à l'école, pouvant se répéter dans la journée, peuvent révéler une angoisse scolaire. Toute difficulté d'insertion de l'enfant, toute adaptation à une vie nouvelle (changement d'école, déménagement, séparation parents, difficultés familiales) peuvent être à l'origine de douleurs abdominales. D'une façon plus générale toute situation de stress, d'anxiété, de tension quelle qu'en soit la cause peut être génératrice de maux de ventre. Certaines difficultés scolaires peuvent s'exprimer également par des douleurs abdominales. L'enfant n'est pas un simulateur et il souffre d'authentiques maux de ventre même si leur origine est psychologique. L'enfant en souffrance psychique laisse son corps s'exprimer : on parle de maladie psychosomatique.
Certains symptômes sont à l'inverse évocateurs d'une cause organique : âge inférieur à 5 ans, fièvre, perte de poids, vomissements, croissance anormale, douleurs articulaires, troubles urinaires, douleurs nocturnes qui réveillent l'enfant, douleur éloignée de l'ombilic, sang dans les selles.
Selon les cas pourront alors être évoqués : la constipation, le reflux gastro-oesophagien, l'ulcère gastrique, l'intolérance au lactose, l'intolérance au gluten (voir fiche spécifique), des maladies inflammatoires du tube digestif (maladie de Crohn et rectocolite hémorragique : voir fiches correspondantes), des troubles urinaires, des maladies du foie et des voies biliaires, des troubles gynécologiques chez la jeune fille ou des malformations anatomiques.
Chez l'enfant, il existe aussi des migraines abdominales c'est à dire avec non pas des maux de tête mais des maux de ventre. Les douleurs abdominales sont paroxystiques associées à des nausées, des vomissements ou une pâleur ainsi qu'à des antécédents familiaux de migraines ; elles sont amendés par les antimigraineux. Elles peuvent alterner avec des épisodes de maux de tête.
Néanmoins certaines authentiques douleurs chroniques d'origine organique peuvent être également majorées ou déclenchées par des facteurs psychogènes (psychologiques).
Quelques chiffres
Les douleurs abdominales aiguës constituent un des motifs les plus fréquents de consultation aux urgences chez l'enfant (3 à 5 % des admissions aux urgences pédiatriques). La majorité des douleurs sont en rapport avec des affections sans gravité. Seuls environ 1% des enfants présentent une pathologie chirurgicale, dont la plus fréquente est l'appendicite.
Parmi les enfants d'âge scolaire, 10 à 15 % souffrent de douleurs abdominales chroniques. 90 % de ces douleurs abdominales répétées sont fonctionnelles et 10 % seulement organiques. On a recensé pas moins de cent causes responsables de maux de ventre récidivants.
Traitement
Il faut toujours chercher à soulager rapidement la douleur :
- en administrant sans attendre un médicament antalgique (= antidouleur), dont la prise devra être répétée de façon systématique, à intervalles réguliers, tant que la cause de la douleur n'a pas été supprimée (Voir fiche douleur),
- en traitant de façon spécifique la cause de la douleur abdominale, qu'elle soit aiguë ou récurrente, si celle-ci est identifiée.
En cas de douleurs abdominales récidivantes fonctionnelles, la correction des déséquilibres diététiques éventuels, et une bonne hygiène de vie peuvent résoudre les douleurs. Aucun régime diététique précis n'a fait la preuve de son efficacité mais une nourriture saine, équilibrée, riche en fruits et en légumes, associée à une bonne hydratation est conseillée. L'activité physique doit être encouragée. Les traitements médicamenteux s'avèrent souvent inefficaces mais peuvent parfois être prescrits. La prise en charge repose plutôt sur des techniques non médicamenteuses telles que la relaxation, les massages, l'hypnose... Une prise en charge psychologique peut-être proposée avec notamment une éventuelle thérapie cognitive et comportementale lorsque le retentissement sur la vie de l'enfant est important.
Conséquences sur la vie scolaire
La douleur empêche l'élève d'être disponible pour les apprentissages. Elle perturbe ses capacités d'attention, de concentration et de mémorisation ; c'est aussi une cause fréquente d'absentéisme scolaire.
Les douleurs abdominales chroniques peuvent ainsi avoir des conséquences majeures sur la vie quotidienne, avec un absentéisme scolaire important. Ce n'est souvent pas tant la gravité de la cause des maux de ventre, que le vécu, le ressenti de la douleur par l'enfant et sa famille qui en sont responsable. En cas de douleur abdominale fonctionnelle, le retour à l'école doit être encouragé. En effet il existe certains avantages à avoir mal : ce sont les « bénéfices secondaires »: attention parentale, évitement de tâches, diminution des obligations, déscolarisation. Un cercle vicieux peut se mettre en place, aggravant les symptômes.
En cas de douleur abdominale d'origine organique les conséquences vont dépendre de la maladie en cause et vont être variables selon les cas.
Quand faire attention ?
En cas de douleur abdominale aiguë violente, inhabituelle, à fortiori si elle est accompagnée d'autres symptômes d'alerte comme la fièvre, l'altération de l'état général, les vomissements répétés, il convient de prévenir les parents de l'enfant afin qu'ils aillent consulter un médecin. De même si un enfant souffrant de douleurs abdominales récidivantes présente un épisode de douleur abdominale aiguë, dont la présentation clinique est inhabituelle.
En cas de douleurs récidivantes liées à une maladie chronique, un Projet d'Accueil Individualisé (PAI) permet qu'un traitement antalgique soit prévu et administré dès le début de la douleur.
Comment améliorer la vie scolaire des enfants malades ?
Pour les enfants présentant des douleurs abdominales récidivantes dans le cadre de maladies chroniques comme les maladies inflammatoires du tube digestif (maladie de Crohn et RCH, voir fiches correspondantes), ou l'intolérance au gluten (voir fiche correspondante) un Projet d'Accueil Individualisé (PAI) peut être rédigé avec les parents et l'équipe pédagogique. Les précautions à prendre pour prévenir la survenue d'épisodes douloureux, ainsi que la conduite à tenir en cas de douleur (médicament à administrer, mesure complémentaire éventuelle...) y seront détaillées. Un éventuel régime diététique spécifique pourra y être notifié.
En cas de douleur récidivantes fonctionnelles ou d'origine psychologique il est important d'être à l'écoute de l'enfant. Ne pas penser qu'il simule une douleur qui est authentique même si elle n'a pas de substrat anatomique. La réassurance de l'enfant permet de l'apaiser et de diminuer une angoisse génératrice elle-même de douleur. En effet, critiquer, ne pas tenir compte de la douleur, comme porter trop attention à la douleur, et donner des privilèges sont associés à des symptômes augmentés et pérennisés. L'attention de l'enfant doit être détournée vers autre chose comme une activité qui l'intéresse. Ainsi la distraction permet de diminuer la douleur.
Si les douleurs abdominales récidivantes handicapent l'enfant dans les apprentissages ou entraînent un absentéisme scolaire important, un point avec les parents, l'équipe enseignante et le médecin scolaire, doit être fait.
L'avenir
Les douleurs abdominales sont des symptômes très fréquents chez l'enfant qui englobent une multitude de causes différentes.
Les douleurs récidivantes chez l'enfant perdurent dans 30 à 50 % des cas chez l'adulte.
Pour avoir des pistes pédagogiques plus détaillées, voir la rubrique jaune.
Pour travailler en partenariat, voir la rubrique rouge.
Pour connaître le point de vue des personnes concernées, voir la rubrique verte : témoignages ou associations.
Pour voir d'autres documents complémentaires, cliquer sur les liens ci-dessous.
La douleur en questions
Brochure téléchargeable sur le site du Centre National de ressources de lutte contre la douleur.
Le site de la Douleur de l'Institut UPSA
Site d'information qui a pour objectif d'améliorer la prise en charge de la douleur et de communiquer sur les actions de l'Institut.
Abdomen
Latin : abdere = cacher.
Synonyme de Ventre. Partie inférieure du tronc, dont la cavité renferme la plus grande partie des appareils digestif et urinaire et, chez la femme, l'appareil génital. La paroi de l'abdomen est une des zones pour l'injection d'insuline.
Corticoïdes
Hormones naturelles ou synthétiques qui influencent ou contrôlent des processus fondamentaux de l'organisme, notamment la tension artérielle, l'inflammation. Les corticoïdes synthétiques sont utilisés comme anti-inflammatoires. Leur utilisation prolongée peut entraîner de nombreux effets secondaires (voir la fiche « traitement par corticoïdes »).
Génétique
Grec : genos = race.
Science qui étudie la transmission des caractères anatomiques, cellulaires et fonctionnels des parents aux enfants.
Voir gène.
Projet d'accueil individualisé (PAI)
Projet contracté entre la famille et l'école d'accueil, avec l'aide du médecin scolaire ou du médecin de PMI pour les enfants de moins de trois ans, chaque fois que l'état de santé d'un élève nécessite un aménagement significatif de son accueil à l'école ordinaire, mais n'engage pas des dispositifs spécialisés devant être validés par la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées) (voir fiche spécifique).
Service d'aide pédagogique à domicile (Sapad)
Service d'aide pédagogique à domicile. (voir fiche spécifique).
Sonde naso-gastrique
La sonde naso-gastrique est un tuyau en matière synthétique, posée au niveau du nez et dont l'extrémitée est au niveau de l'estomac.
Elle est utilisée
- soit pour vider l'estomac, en cas de problème digestif important (comme une occlusion par exemple),
- soit pour alimenter le sujet lorsque la voie orale est contre-indiquée ou n'est pas suffisante. (voir glossaire : "Nutrition entérale")
Stomie
Grec : stôma = bouche.
Suffixe désignant une intervention chirurgicale de dérivation, qu'il s'agisse d'ouvrir à la peau un conduit naturel (comme l'estomac = gastrostomie, iléon = iléostomie, colon = colostomie, uretère urétérostomie). Il peut aussi s'agir de faire se rejoindre à l'intérieur de l'organisme deux organes qui normalement ne communiquent pas ou dont il faut rétablir la communication (exemple: ventriculo-cisternostomie au niveau du cerveau , voir fiche hydrocéphalie).